« Nous n’avons pas la même vision politique »

En janvier dernier, dans notre édition estampillée #103, nous revenions sur un projet d’aménagement du Boulevard des crabes intitulé « la Promenade des Mahorais » dont la première parution datait de février 2014. Comme annoncé, nous avons rencontré le premier magistrat de la commune pour en parler.

C’est dans son bureau situé au 1er étage de l’Hôtel de ville que le maire Said Omar Oili nous reçoit un soir de ce samedi 28 avril 2018. Et tout de suite de rentrer dans le vif du sujet « un projet d’esquisse, pour l’aménagement du boulevard des crabes, a été réalisé en 2010 par le bureau d’études CET avec une partie aménagement (circuits piétons, transports doux, places publiques, aires de stationnement) et éclairage pour coût total, estimé à l’époque à trois millions cent-mille euros (3.1M€). C’est le FIP 2012 (fonds intercommunal de péréquation) d’un montant de 408 000€ (quatre-cent-huit mille euros) et d’un emprunt auprès de l’AFD à hauteur de 700 000€ (sept-cents mille euros). Mais comme vous avez pu le constater, seule la partie éclairage a été effectivement réalisée en 2014 par la Sogea pour une facture qui s’élève à 450 000€ (quatre-cent-cinquante mille euros) », nous annonce le Maire. À ce stade, beaucoup d’entre nous se demandent alors les raisons de cette réalisation partielle du projet même si pour certains déjà des éléments de réponse commencent à bouillir dans leur tête. Et le premier magistrat de continuer « Les raisons sont, vous vous en doutez bien d’ordre financier. En effet, la situation financière de la commune, en déficit, tant en fonctionnement qu’en investissement, ne permettait pas de poursuivre les travaux. Fin 2014, le résultat affichait un déficit cumulé de -1,3M€ (un million trois-cents mille euros). Un déficit dans lequel était plongée la commune depuis 2011. En janvier 2015, le niveau de trésorerie de la collectivité présentait plus de 1.6 M€ (un million six-cents mille euros) de factures en instance de paiement, auxquelles s’ajoutaient en réalité plus de 600 000€ (six-cents mille euros) de factures non mandatées (donc non visibles pour le comptable). Lorsqu’en début d’année 2015 nous avons fait une mise à plat de toutes les factures en attente avec les multiples relances des fournisseurs, la situation budgétaire était en réalité pire que ce que l’on croyait. Les dettes de Sogea, par exemple, s’élevaient à plus 700 000€ (sept-cents mille euros) ».

Quand on lit entre les lignes, on comprend aisément que Said Omar Oili fustige la mauvaise gestion de la précédente équipe municipale avec des projets non bouclés financièrement. « Des projets de 2010, comme la réhabilitation du quartier Potéléa, avec des travaux d’électrification et d’assainissement ont été finalisés en fin 2013 sans bouclage financier. La réhabilitation du quartier Potéléa a coûté au total 2,17M€ (deux millions cent-soixante-dix mille euros) alors que les travaux ont été finalisés début 2014. Les dettes ont fini d’être payées en 2016 parmi elles, figuraient des factures Sogea ou encore Kassim EleC ..). En clair, l’emprunt de l’AFD a permis de financer les travaux qui avaient déjà été engagés mais pour lesquels les plans de financement n’avaient pas été finalisés. L’AFD a été mise au courant dès 2015 de la situation », poursuit S2O. Alors que les deniers publics fonctionnent par fléchage, ici c’était « au petit bonheur la chance ». L’emprunt de l’AFD destiné au projet de la Promenade des Mahorais a donc servi à payer des travaux d’aménagement de Potéléa. Mais que devient ce projet qui en vaut vraiment le coup ? Des études qui partent aux oubliettes ?

« Fin 2014, nous avons créé la Communauté de communes de Petite-Terre. Cette intercommunalité a pour vocation de porter les grands projets d’aménagement, dont le projet de rénovation urbaine de la Vigie et les grands schémas directeurs d’aménagement. Aujourd’hui l’aménagement de la barge à l’aéroport, dont une partie correspond au boulevard des crabes, fait partie du projet de Territoire validé par les élus de l’intercommunalité. Le contrat de ruralité signé dernièrement a permis par exemple de relancer la question de l’aménagement d’un quai de débarquement adapté pour les pêcheurs et la construction d’une halle. Les études sont en cours, avec une vision globale de l’aménagement du front de mer en cohérence sur les deux communes de Pamandzi et Dzaoudzi » confie le maire.

La communauté de communes de Petite-Terre reprend donc le dossier et les études déjà réalisées. Et entre deux discussions, il confiera « entre l’aménagement du Bd des crabes et la réhabilitation des quartiers insalubres, je préfère de loin m’occuper de La Vigie, Toutouroucha ou encore Oupi que le front de mer. Si on s’était occupé de la gestion des eaux pluviales de La Vigie depuis tout ce temps, on aurait depuis des lustres éviter que des quartiers de la commune se retrouvent sous les eaux en temps de pluie ». Une vision politique qui diverge de l’ancien maire Mohamed Bacar M’colo N’Tché. Quoi de plus normal sinon ils seraient tous deux dans le même parti.

La Promenade des Mahorais a donc changé de mains et c’est désormais l’interco qui en a la charge. Verra-t-elle le jour ?